I – L’automne : entre ralentissement, douceur et fin de cycle

L’automne succède à l’été, cette saison désormais associée dans nos sociétés modernes aux vacances, à la légèreté et à la détente. Tandis que le 1er septembre marque pour beaucoup la rentrée scolaire et le retour au travail, l’automne s’installe plus lentement, quelques semaines plus tard. Psychologiquement, il n’est pas rare que l’on cherche alors un peu de réconfort. Cela aide à contrebalancer la morosité qui peut accompagner la rentrée et les jours qui raccourcissent.

L’équinoxe d’automne, autour du 21 septembre, marque un point d’équilibre entre jour et nuit, avant que la balance ne penche progressivement vers la « saison sombre ». Jusqu’au solstice d’hiver en décembre, les nuits s’allongent, la lumière décline et la nature semble se retirer. Cette lumière automnale, plus basse et plus dorée – parfois sublimée par un « été indien » – enveloppe le quotidien d’une douceur presque nostalgique. Les arbres se parent d’ocre, de roux, de pourpre et de brun : un festival de teintes chaleureuses qui accompagne symboliquement le passage vers la fin de cycle.

Ce ralentissement et ce dépouillement de la nature nous invitent à faire de même. Pourtant nos rythmes contemporains sont souvent déconnectés – voire contraires – à ces cycles naturels. Beaucoup choisissent aujourd’hui d’y revenir, et ce tempo semble particulièrement propice à la pratique des Tarots & Oracles : prendre le temps pour soi, nourrir son intuition, entamer ou reprendre un chemin d’introspection. De nombreux artistes se sont emparés de cet engouement autour de l’automne et de ses symboliques. Leurs créations explorent ces thématiques et en reprennent les palettes de couleurs. Cet attrait est d’autant plus fort que l’automne est jalonné de fêtes et de traditions qui en façonnent encore aujourd’hui l’imaginaire.

II – Repères culturels : Mabon, Samhain, Halloween et fêtes des morts

Dans les cultures païennes d’Europe, l’année était ponctuée de huit grandes fêtes saisonnières appelées “sabbats”. Aujourd’hui, elles sont réparties entre solstices, équinoxes et “mi-saisons”. Ces sabbats célébraient les étapes clés du cycle agricole : germination, croissance, récolte puis repos de la terre. Deux d’entre eux marquent particulièrement la saison automnale : Mabon, à l’équinoxe de septembre, et Samhain, à la fin octobre, dont découleront plus tard la Toussaint, la Fête des Morts et l’actuelle Halloween.

Mabon, autour du 21 septembre, célèbre l’abondance et l’équilibre.

Il clôt le cycle des moissons et honore les récoltes accumulées avant l’hiver : l’image de la corne d’abondance résume bien cette idée de réserves saines et nourrissantes à constituer avant le repli. Dans les mythes, Mabon est parfois figuré comme un jeune dieu solaire, roi de fertilité, qui se sacrifie pour nourrir le cycle. Il retourne symboliquement dans l’ombre de la terre, comme les graines ensevelies qui attendent le renouveau. Ce paradoxe entre lumière et obscurité, abondance et dépouillement, marque le seuil de la « saison sombre ».

→ En apprendre plus sur Mabon avec le Grimoire des sabbats de Ketty Orain-Ferella

Samhain, environ six semaines plus tard, est l’autre grand pivot de l’année païenne.

Considérée comme le « réveillon du nouvel an » celtique, elle marque la fin de l’été (c’est d’ailleurs son sens étymologique) et l’entrée dans l’hiver. Samhain est perçue comme un temps liminal : la frontière entre les vivants et les morts s’efface, et les ancêtres sont invités à franchir le seuil. Dans ce contexte, il était courant d’allumer des feux, de laisser de la nourriture pour les esprits ou de pratiquer la divination, profitant de ce moment où le voile entre les mondes était censé s’amincir.

→ En apprendre plus sur Samhain avec le Grimoire des sabbats de Ketty Orain-Ferella

Avec la christianisation, ces pratiques ont été absorbées puis transformées.

Au IXᵉ siècle, l’Église catholique instaure la Toussaint le 1ᵉʳ novembre, suivie le 2 novembre de la Fête des Morts, dédiée à la commémoration des défunts. Le message change – la mort n’est plus vue comme une étape du cycle mais comme un passage vers un au-delà éthéré, mais le cœur symbolique demeure : honorer celles et ceux qui nous ont précédés.

Halloween, qui culmine aujourd’hui dans la nuit du 31 octobre, est l’héritière directe de ce long héritage.

Son nom vient de All Hallow’s Eve (« veille de la Toussaint »). En traversant l’Atlantique avec les migrants irlandais, ses traditions se sont transformées. Les navets sculptés en lanternes (Jack-o’-lantern) sont devenus des citrouilles dans le Nouveau Monde, et les processions ont pris la forme du trick or treat. De fête du seuil et de la mémoire, Halloween est devenue une célébration populaire de l’étrange, du macabre et de la sorcellerie. Sous ses masques et ses couleurs vives, elle garde, toutefois, la trace de Samhain.

C’est cet ensemble de repères culturels – abondance, équilibre, fin de cycle, mémoire des morts et passage entre les mondes – qui nourrit aujourd’hui les thématiques et les esthétiques des Tarots & Oracles d’Automne & Halloween.

III – Thématiques et esthétiques des Tarots & Oracles d’Automne & Halloween

L’offre actuelle de jeux est riche. Qu’ils célèbrent la nature en mutation, la mémoire des ancêtres ou les frissons d’Halloween, ils partagent une même ambition : proposer un cadre visuel et symbolique cohérent avec la saison, pour accompagner les pratiques introspectives et spirituelles propres à cette période. Voici quatre propositions avec des exemples concrets que vous pouvez explorer en boutique.

Nature en déclin et cycle des saisons

Ces jeux traduisent l’idée d’une fin de cycle fertile : forêts embrumées, feuilles mortes, herbiers desséchés, animaux en repli. Les couleurs sont ocres, brunes, cuivrées. Ils invitent à ralentir, à récolter, à tirer des bilans avant d’amorcer un nouveau cycle.

• Automn Season Tarot de Dani’el Norman (nouveauté à paraître cet automne)
• The Meraki Tarot – 4th Edition de Kerri Snook
• The Lighted Window Tarot de Lindsay Hook

Mémoire, ancêtres et au-delà

Dans la lignée de Samhain et de la Fête des Morts, certains jeux mettent l’accent sur le voile et la communication entre les mondes : spiritisme, autels, cierges, portraits anciens, symboles funéraires stylisés. Ces esthétiques ne sont pas morbides. Elles proposent un rapport apaisé à la mort, vue comme continuité. En outre, elles favorisent les tirages spirites, de deuil ou transgénérationnels.

• Oracle Allan K. de Hyena Soul Shadow Tarot (nouveauté à paraître cet automne)
• A Grieving Tarot de Sara Kathleen
• Roses, Dust & Ashes Oracle de Stacey Williams-Ng

Ombre, mystères et sorcellerie

D’autres jeux s’emparent des archétypes plus sombres, liminaux ou occultes : sorcières, crânes, familiers nocturnes, symboles alchimiques et ésotériques. Ici, l’imagerie est souvent contrastée et théâtrale : noirs profonds, violets saturés, rouges carmin.

• Ominous Oracle de Khvost et Lida Pavlova (réassort sous peu)
• Earthly Souls & Spirits Moon Oracle de Terri Foss
• Oracle of Novice Witches de Elisa Macellari et Francesca Matteoni

Halloween ludique et iconographie populaire

Enfin, certains jeux assument un ton plus léger et festif, reprenant l’iconographie populaire d’Halloween : citrouilles, maisons hantées, bonbons, petits monstres stylisés. Moins introspectifs, ils cultivent le plaisir visuel et l’imaginaire enfantin.

• Halloween Tarot de Kipling West
• Wicked Tales Lenormand de Monica Bodirsky
• Diary of Skeleton Tarot de Chuan Zeng, Yan & Lia

Cette sélection de thématiques et d’esthétiques n’a rien d’exhaustif : l’automne inspire une grande diversité d’interprétations visuelles et symboliques, que vous pourrez explorer plus en détail dans la partie 5 consacrée à notre sélection de jeux. Et parmi les artistes qui ont marqué de leur empreinte cet imaginaire automnal et macabre, impossible de ne pas citer Patrick Valenza.

IV – Patrick Valenza : un univers onirique et inquiétant

Certains univers semblent faits pour l’automne. Celui de Patrick Valenza en est l’exemple le plus marquant.
Son œuvre déploie une inquiétante étrangeté mêlant grotesque poétique et théâtralité lunaire : silhouettes étirées, visages lunaires, décors industriels ou forains en clair-obscur, humour noir feutré et forte expressivité gestuelle. Malgré cette atmosphère déroutante, les symboles clés restent limpides, offrant des tirages visuellement saisissants mais toujours lisibles et concrets.

Ce qui distingue aussi Patrick Valenza, c’est sa recherche graphique : contrastes appuyés, nuits saturées, et un goût assumé pour les variations chromatiques (Midnight, Blood, Samhain, Paradoxical, etc.) qui transforment l’ambiance de lecture sans jamais altérer la structure symbolique des jeux.
Son univers si singulier, entre rêve et cauchemar, s’accorde naturellement à l’automne et à ses thématiques liminales.

Deux piliers disponibles en éditions françaises (Salon des Arcanes)

• Deviant Moon Tarot — Édition française :

Un monde au clair de lune : personnages stylisés, arrière-plans urbains et industriels, clair-obscur marqué. C’est par ce jeu, édité pour la première fois en 2013 par U.S. Games Systems, que Patrick Valenza est devenu un créateur reconnu. J’ai eu le plaisir d’inaugurer les éditions Salon des Arcanes par sa traduction française.

• Trionfi della Luna — Édition française :

Le “cousin éloigné” : plus baroque et ésotérique, personnages excentriques “à face de lune”. Ce jeu, si proche et pourtant si différent du Deviant Moon, a connu de nombreuses variations auto-éditées avant d’être repris par U.S. Games Systems et traduit par le Salon des Arcanes.